Echos de Richard Matheson

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Une séance d’hypnose ne peut pas avoir de conséquences, surtout quand vous n’y croyez pas? Enfin, ça c’est ce que vous pensiez. Avant.

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Genre : thriller

Année d’édition originale : 1958

 

Pourquoi j’ai choisi ce livre / cet auteur ?

Tranquillement installée dans mon fauteuil préféré, je suis très détendue. Je lance le dvd du film Hypnose, ne l’ayant pas vu depuis une éternité. Je ne suis qu’aux prémisses du générique, quand des mots à l’écran s’affichent : « based on a novel « A stir of echoes » by Richard Matheson ». Mon sang ne fait qu’un tour! Comment ai-je pu jusqu’à présent passer à côté de cette information!

(On me signale dans l’oreillette que j’en fait un tantinet trop dans le mélodrame. Mais qu’importe : ma chronique, mes règles)

Je commande dans la foulée le roman sur un site d’occasion. Oui je vous préviens d’emblée il semble qu’il ne soit trouvable qu’en occasion. Il est assez court, 245 pages, et j’ai été très vite happée dans ma lecture une fois celle-ci entamée.

 

Résumé (sans spoil)

Tom Wallace est un jeune père de famille, sur le point de l’être une deuxième fois, un homme somme toute assez banal et sans histoires, rationnel. Forcément l’hypnotisme il n’y croit pas, c’est donc confiant qu’il accepte d’être le sujet d’une expérience qui va changer sa vie à tout jamais. Désormais le réceptacle erratique des pensées environnantes, il va vite comprendre qu’un fantôme hante sa maison. Ce qu’il attend de Tom? Qu’il venge son assassinat…

 

Mon avis

« Les types arrogants dans ton genre sont les premiers à s’effondrer« . Qui n’a jamais, ado ou plus vieux, participé à une séance de spiritisme, d’hypnose ou autre expérience prétendument paranormale? On se fait des petites frayeurs, on rigole et ça ne va plus loin. Par défi contre un beau-frère qu’il n’apprécie guère, Tom Wallace va accepter de se faire hypnotiser. Sauf que bien sûr rien ne va se passer comme prévu.

En soit, le roman de Matheson aborde un sujet peu original.  Un fantôme hante Tom et n’arrive pas à partir tant qu’il ne sera pas en paix. C’est même un thème assez classique de la littérature fantastique (je ne citerai que Le fantôme de Canterville  d’Oscar Wilde) : la mort est un événement qui peut prendre des dimensions tragiques, et il y a quelque chose d’intolérable de partir de manière brutale sans régler ses affaires auparavant. Le corps retourne à la terre, mais l’esprit erre. Le hic, c’est que le monde des vivants et celui des esprits se côtoient mais ne se croisent pas.

Ce qui va attirer l’attention du lecteur, c’est que ce thème gothique au possible va prendre place dans un monde des plus banals. Le roman date de 1958, mais 50 ans plus tard il n’est pas désuet dans cette modernité, ce « maintenant ». Le lecteur peut aisément prendre la place de Tom. C’est un quartier de banlieue comme il en existe partout : des voisins qui se fréquentent, des enfants qui jouent ensemble. On sait bien que c’est un vernis de bienséance, bien que des amitiés sincères s’y nouent. La voisine trop avenante, le couple dysfonctionnel, celui trop parfait pour être honnête.

Là où le fantôme de Canterville était visible aux yeux de tous, le fantôme qui hante Tom ne hante que lui, lui et son esprit totalement libre suite à une séance d’hypnose. C’est le fil rouge du roman, mais Tom perçoit aussi d’autres choses. En général des malheurs à venir, des intentions malveillantes. Cela peut paraître très brouillon au lecteur, on peut avoir l’impression que l’auteur ouvre trop de pistes, mais au contraire c’est ce qui fait qu’on s’immerge dans le récit, on accepte de lâcher un peu la rationalité. Tom ne choisit pas à quoi il est réceptif. Il est réceptif, point.

L’hypnose n’est qu’un prétexte : ce qui importe, c’est qu’un jour notre esprit pourrait être complètement ouvert et réceptif. Après tout, il est communément admis que l’humain n’utilise qu’une petite partie des capacités de son cerveau. Et qu’un monde habituellement invisible pourrait se révéler. Pour le meilleur? Surtout pour le pire. En fait, c’est juste la nature humaine, avec ses travers et néanmoins sa bonté, puisque Tom va faire de son mieux pour aller jusqu’au bout de sa quête (il aurait pu après tout juste fuir, déménager… ou fuir disons définitivement)

Matheson part de ce qui rassure : le foyer, la famille, la maison, le quartier. Et démonte peu à peu ce qui devrait nous rassurer. Nul n’est tranquille entre quatre murs. Cela ne veut pas dire qu’il faut baisser les bras.

Évidemment, je pourrais en dire plus, mais pour la plupart vous avez vu son adaptation. Des surprises vous attendent. Bonnes? Je ne peux pas le garantir, vous vous en doutez.

Ce roman court, du haut de ses 245 pages, s’engloutit en peu de temps. Vous voulez tourner les pages. Pas de style pompeux, pas de désir d’impressionner le lecteur. Vous êtes juste pris dedans. C’est loin d’être le roman le plus connu de Richard Matheson, mais je vous conseille de vous jeter dessus si vous en avez l’occasion.

 

Mon personnage préféré

Sans conteste c’est le protagoniste principal qui a ma préférence. C’est un biais assez courant que d’éprouver de la sympathie voire de l’empathie pour le narrateur. Si on ajoute le talent d’écriture de Matheson, c’est une évidence. J’apprécie qu’il n’ait pas fait de Tom un homme torturé qui cache de lourds secrets. Par conséquent, on s’identifie d’autant plus à cet homme qui gère comme il peut ce talent supranormal, et qui est rapidement dépassé par celui-ci.

 

Le passage qui m’a marquée

La séance d’hypnose. J’entends par là au moment où elle fonctionne, non les gamineries de Tom qui sont autant de bravades face à une pratique auquel il ne croit pas, mais après. La salle de cinéma, noire. Les lettres sur l’écran : « DORS ». Je n’exclue pas être influencée par le film. Mais cette scène m’a toujours marquée car elle donne un cadre net, ce n’est pas ridicule avec un pendule ou autre accessoire ésotérique. Elle n’est ni choquante, ni la plus révélatrice du roman. Pourtant c’est celle-ci et pas une autre.

 

Une citation

« Les peurs les plus hideuses, – je le découvris alors – pouvaient survenir en plein jour , dans le décor le plus banal. La nuit n’est pas indispensable, pas plus que les orages, les vents déchaînés, ou les remparts battus par la pluie du repaire du savant fou. Il n’y avait pas de monstres dans cette voiture; mais trois humains, tout simplement.  Aucune créature étrange de la nuit. Pas de bruit bizarre, ni de spectacle inquiétant. Et, pourtant, je n’oublierai jamais la révulsion intolérable que j’éprouvai à ce moment-là. »

 

Bonus

 

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Difficile de passer à côté de l’adaptation cinématographique. Une vraie réussite! Rien que la séquence d’introduction, entre la bande originale très oppressante et l’attitude totalement naturelle de l’enfant… J’ai vu le film au cinéma et j’ai un souvenir d’une immersion d’une heure et demie, et cette impression ne s’est pas démentie au fil des revisionnages. Pour être tout à fait honnête, je trouve que l’adaptation est un cran au-dessus du roman, pourtant excellent. Les coupes réalisées sont pertinentes et le propos est resserré autour de la quête de Tom pour comprendre ses visions liées au fantôme. Bref,  film à voir de toute urgence! « Tom Witzky, ouvrier dans la banlieue de Chicago, mène une vie de père de famille tout à fait ordinaire. Lors d’une soirée entre amis, Tom accepte, par jeu, une séance d’hypnose. Plus tard dans la nuit, il est assailli par des visions, des rêves troublants. De jour en jour, il voit toujours davantage de choses qu’il est incapable d’expliquer, entend des voix qu’il ne peut ignorer. Inexorablement, sa vie bascule. Bientôt, les visions de Tom deviennent réalité. Il voit sa famille en danger, il voit la mort… « 

Il a été reproché à l’époque la grande similitude avec Sixième sens, mais rappelez-vous que l’histoire originale a été publiée en 1958. Les deux films sont sortis quasiment en même temps, le hasard du calendrier.

 

Dead zone

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Comme toute fan de Stephen King qui se respecte, je m’arrange pour placer une recommandation d’une de ses œuvres dans cette section. Dead zone me paraissait approprié : certes il n’est question ni d’hypnose ni de fantôme, mais John Smith acquiert bien son don accidentellement, qui lui permet d’avoir accès à des connaissances hors de portée du commun du mortel. En plus, il a fait l’objet d’une adaptation fantastique par Cronemberg.

« John Smith, comme son nom l’indique, est un type banal. Jusqu’à ce qu’un accident de voiture le plonge dans un coma profond. Quand il revient enfin à lui, il est en apparence le même. Mais il a ramené quelque chose de la zone morte où il gisait pendant tant de mois ; un don de prémonition qui le mettra vite devant un terrible dilemme. Pour préserver le monde d’un mal inéluctable, devra-t-il tuer l’homme en passe de devenir le prochain président des États-Unis ? »

 

La cache du diable Dean Koontz

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Un pitch assez similaire à Dead zone, avec la patte Koontz, c’est-à-dire un peu plus dosé en maléfique. Cela vous tente? C’est la Cache du diable.

« Victime d’un grave accident de voiture, Hatch Harrison meurt durant son transfert à l’hôpital. Un médecin spécialisé dans de révolutionnaires techniques de réanimation réussit à le ramener à la vie. Miracle ou malédiction ? Car, très vite, la nouvelle existence de cet Américain bien tranquille se peuple de visions et de cauchemars insoutenables. Comme si une présence maléfique s’était emparée de lui pendant son voyage au cœur des ténèbres… »

 

Hypnose de Peter James

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Home sweet home. Enfin… plus ou moins. Comme pour Echos, on ne sait pas toujours ce que cachent les murs de votre petit nid. Vous ne le savez pas encore, mais vous ne voulez pas savoir. « Lorsque Charley voit la maison de ses rêves pour la première fois, c’est comme si elle l’avait toujours connue, qu’elle y avait déjà habité. Et lorsqu’elle y emménage avec son mari Tom, son impression se transforme en véritable certitude. De sinistres souvenirs d’une vie antérieure la hantent. Ils sont si terrifiants et si violents que Charley décide d’entamer des séances d’hypnose. Malheur à celui qui s’aventure dans le passé… »

 

L’Hypnotiseur de Lars Kepler

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Les pays scandinaves sont décidément très forts pour nous présenter des auteurs de polars noirs de talent. Après Stieg Larsson et Camilla Lackberg, voici Lars Kepler. Le subconscient de l’homme est un chemin risqué, surtout quand il a été témoin d’atrocités. A vos risques et périls! « Dans une maison de la banlieue de Stockholm, une famille est sauvagement assassinée. Seul un garçon échappe au massacre, mais il navigue entre la vie et la mort, inconscient. L’inspecteur Joona Linna décide alors de recourir à un hypnotiseur pour pénétrer le subconscient du garçon et tenter de revoir le carnage à travers ses yeux… »